•  


    votre commentaire
  • Analyse L’Urugay envisage aussi la légalisation. Le Mexique et la Colombie, eux, contestent la guerre à la drogue.

    Par MICHEL HENRY

    Libération

    En 1931, un médecin américain, le Dr Fossier, écrivait : «La race dominante et les pays les plus éclairés sont alcooliques, alors que les races et les nations dépendantes du chanvre et de l’opium se sont détériorées mentalement et physiquement, bien qu’elles aient auparavant atteint des sommets en termes de civilisation et de culture.» Que penserait-il aujourd’hui de son pays ?

    Détenir 28 grammes de cannabis devient légal dans l’Etat de Washington si on a plus de 21 ans (lire ci-contre) et il en sera bientôt de même dans le Colorado. Plus fort : les électeurs de ces deux Etats ont aussi voté la future légalisation du commerce de cannabis. Début 2014, des boutiques vendant de l’herbe et payant des taxes comme tout commerce pourraient y voir le jour. Aucun pays au monde ne l’a fait, même pas les Pays-Bas : si la vente y est légale, la production y reste illégale.

    Ainsi, le gendarme antidrogues de la planète se porterait à l’avant-garde de la légalisation ?

    On hallucine.

    Les Etats-Unis ont inventé la prohibition du cannabis il y a un siècle et mènent depuis quarante ans une «guerre à la drogue» dans laquelle ils ont déjà englouti - en pure perte - plus de 1 000 milliards de dollars. Voilà qu’ils tournent casaque ? Il n’est pas écrit que le pouvoir américain l’acceptera. Barack Obama a toute l’année 2013 pour trouver une parade contre cette révolution qui contrevient à la loi fédérale et aux conventions internationales.

    Mais pour un pays ultrarépressif qui envoie chaque année des centaines de milliers de personnes derrière les barreaux pour des affaires de stupéfiants, il y a déjà là un coup de tonnerre. Le vers est dans le fruit. Les électeurs des deux Etats se seraient-ils collectivement mis aux pétards ? Non. Leur vote reflète plutôt une vision pragmatique : les centaines de millions dépensés pour la répression dans le pays ne sont pas efficaces. Et, au niveau international, la «guerre à la drogue» fait plus de dégâts que la drogue elle-même.

    Effronterie. Ce dernier constat remue aussi l’Amérique latine. L’Uruguay discute d’un projet présenté par son président pour organiser un marché légal du cannabis. Marre du marché noir et des règlements de compte. Et depuis plusieurs mois, Mexique, Colombie ou Guatemala remettent ouvertement en cause la «guerre à la drogue» qu’ils subissent sur leur sol, une effronterie qu’ils n’auraient jamais osée auparavant. «Il faut revoir la stratégie internationale sur les drogues.

    Cela ne peut plus attendre», ont exigé le 12 novembre le Mexique, le Costa Rica, Honduras, Belize et le Guatemala. Au Mexique, où la guerre contre les narcos a fait 60 000 morts en six ans, le gouverneur de l’Etat du Chihuahua a proposé de légaliser l’exportation de marijuana : comme elle est légale dans deux Etats américains, il y a un marché à prendre.

    Un tabou est brisé, l’autorité des Etats-Unis est défiée. Mais existe-t-elle encore ? «Il n’y a plus d’instance internationale qui a les moyens de faire appliquer les conventions internationales», relève la sociologue Anne Coppel (1). Jusqu’ici, tout pays qui sortait de la ligne dure fixée par les Etats-Unis pouvait numéroter ses abattis. Cela semble fini. «Si l’Uruguay ou le Maroc décident de légaliser, qui pourra les en empêcher ?» demande Coppel. Personne. «Les Etats-Unis donnaient le ton. S’ils ne le font plus, tout devient possible.»

    Abstinence. La période qui s’ouvre est à l’incertitude. La prohibition reste la règle, mais il n’est plus interdit de développer des stratégies régionales, voire locales : chaque pays, chaque région peut traiter la question à son goût - ou essayer. On ne s’en est pas aperçu en France (lire page 5), mais l’espoir d’un changement de paradigme est bien réel, un siècle après l’introduction de la prohibition des drogues, via la Convention internationale de l’opium, signée en 1912 à La Haye.

    A l’époque, le puritanisme américain était à la manœuvre, couplé à l’inatteignable objectif de l’abstinence universelle. Pendant des siècles, les êtres humains avaient consommé des drogues sans que les autorités s’en mêlent. Mais début XXe, les Etats-Unis les ont identifiées comme «anti-américaines», car importées ou consommées par des minorités : Chinois, Noirs, Mexicains… Quand El Paso, au Texas, a interdit la marijuana en 1914, «la raison sous-jacente n’est pas de prohiber le cannabis, mais de se débarrasser des Mexicains», soutient l’historien Martin Booth.

    En 1938, un médecin témoignait à un procès dans le New Jersey : «Après deux bouffées de marijuana, je me suis transformé en chauve-souris.» Désolé docteur, mais la chauve-souris a pris le pouvoir dans deux Etats.

    (1) Auteure de «Drogues : sortir de l’impasse», avec Olivier Doubre aux éditions La Découverte. 

    site source :http://blocpot.qc.ca/node/2827 


    votre commentaire
  •  


    votre commentaire
  • La prohibition de la consommation de haschisch dans le Royaume chérifien est moralement hypocrite et socialement dévastatrice 

     

    Destruction de plants de cannabis, Larache (nord du Maroc), 2006. © ABDELHAK SENNA / AFP 

    Le soleil se lève sur Boulizem, un douar perdu au fin fond du Rif (région montagneuse du nord du Maroc).

    Dietrich et Ulrike, un couple de bobos (bourgeois-bohème) berlinois, se réveillent avec le chant du coq.

    Un soir, dans une famille de kificulteurs, ils ont dégusté un poulet succulent nourri au bon grain de cannabis. La nuit d'après, ils ont dormi à l’auberge Peshawar à Ketama (de son nouveau nom Issaguen, dans le centre-nord).

    C’est leur troisième jour du circuit «Sur la route du kif», un parcours de tourisme équitable qui fait fureur en Europe.

    Les Berlinois bourlingueurs ont commencé leurs vacances à Chaouen (nord-ouest), où ils se sont délestés de quelques centaines d’euros au cannashop, un concept store qui vend toute la production de chanvre made in Morocco: chaussettes, blousons, sacs en toile, babouches, tee-shirts ethniques, tapis, compléments alimentaires, shampooings et bains moussants...

    Autant de cadeaux ethniques qui feront plaisir à leurs amis branchés du bord de la Spree, une rivière qui traverse Berlin.

    Après le petit-déjeuner, ils embarquent dans la berline de leur chauffeur. Il y a dix ans, en 2012, il fallait subir une heure de mauvaises pistes pour accéder à Bouzilem et ils auraient dû louer un 4x4.

    Mais depuis la légalisation (en réalité, le cannabis est autorisé dans certains districts arabophones du Rif, comme Ketama), les 20 milliards de revenus annuels de la TCK, la taxe sur la consommation du kif, ont été réaffectés en priorité dans le programme de désenclavement de la région.

    En deux ans, on a couvert le Rif de routes, d’écoles et d’hôpitaux. Dans la foulée, les élus locaux ont obtenu la construction du TGV Tanger-Oujda que Dietrich et Ulrike emprunteront, le dernier jour, pour revenir, en une heure trente, dans la ville du détroit, afin de prendre leur avion. Une année de revenus du kif a suffi à financer 80% du projet.

    Les treks les plus courus

    Petite randonnée matinale pour les deux Allemands, qui quittent leur BMW de location pour une découverte balisée des champs de cannabis.

    Depuis les croisements opérés sur les variétés locales avec les plants pakistanais, les tiges grimpent à plus de deux mètres. Et parcourir ces paysages accidentés, d’un vert soutenu, est devenu l’un des treks les plus courus chez les randonneurs européens.

    A midi, après trois heures de marche le long d’un sentier constitué de panneaux explicatifs sur l’histoire du kif, Dietrich et Ulrike rejoignent la voiture pour un déjeuner à Bab Berred. Dans la ville aujourd’hui rénovée, ils achètent quelques sticks au cannashop du coin, Luckif Strike bio pour monsieur, Ztla light pour madame.

    D’un commun accord, ils décident de ne pas en fumer plus d’une après le repas. Ce soir, ils doivent rester lucides. Le couple d’hédonistes s’est inscrit à un atelier cuisine à Ketama, pour apprendre à préparer le maâjoun (une confiserie à base de cannabis)...

    Ils pourront rapporter deux ou trois pots pour leur consommation personnelle à Berlin. Comme presque toute l’Europe, l’Allemagne avait entériné la légalisation du cannabis avant la fin des années 2010 

    suite site source :http://www.slateafrique.com/99963/maroc-pourquoi-il-faut-legaliser-le-cannabis 


    votre commentaire
  • La prohibition de la consommation de haschisch dans le Royaume chérifien est moralement hypocrite et socialement dévastatrice 

    Destruction de plants de cannabis, Larache (nord du Maroc), 2006. © ABDELHAK SENNA  

     

    Le soleil se lève sur Boulizem, un douar perdu au fin fond du Rif (région montagneuse du nord du Maroc).

    Dietrich et Ulrike, un couple de bobos (bourgeois-bohème) berlinois, se réveillent avec le chant du coq.

    Un soir, dans une famille de kificulteurs, ils ont dégusté un poulet succulent nourri au bon grain de cannabis. La nuit d'après, ils ont dormi à l’auberge Peshawar à Ketama (de son nouveau nom Issaguen, dans le centre-nord).

    C’est leur troisième jour du circuit «Sur la route du kif», un parcours de tourisme équitable qui fait fureur en Europe.

    Les Berlinois bourlingueurs ont commencé leurs vacances à Chaouen (nord-ouest), où ils se sont délestés de quelques centaines d’euros au cannashop, un concept store qui vend toute la production de chanvre made in Morocco: chaussettes, blousons, sacs en toile, babouches, tee-shirts ethniques, tapis, compléments alimentaires, shampooings et bains moussants...

    Autant de cadeaux ethniques qui feront plaisir à leurs amis branchés du bord de la Spree, une rivière qui traverse Berlin. 

    Après le petit-déjeuner, ils embarquent dans la berline de leur chauffeur. Il y a dix ans, en 2012, il fallait subir une heure de mauvaises pistes pour accéder à Bouzilem et ils auraient dû louer un 4x4.

    Mais depuis la légalisation (en réalité, le cannabis est autorisé dans certains districts arabophones du Rif, comme Ketama), les 20 milliards de revenus annuels de la TCK, la taxe sur la consommation du kif, ont été réaffectés en priorité dans le programme de désenclavement de la région.

    En deux ans, on a couvert le Rif de routes, d’écoles et d’hôpitaux. Dans la foulée, les élus locaux ont obtenu la construction du TGV Tanger-Oujda que Dietrich et Ulrike emprunteront, le dernier jour, pour revenir, en une heure trente, dans la ville du détroit, afin de prendre leur avion. Une année de revenus du kif a suffi à financer 80% du projet.

    Les treks les plus courus

    Petite randonnée matinale pour les deux Allemands, qui quittent leur BMW de location pour une découverte balisée des champs de cannabis.

    Depuis les croisements opérés sur les variétés locales avec les plants pakistanais, les tiges grimpent à plus de deux mètres. Et parcourir ces paysages accidentés, d’un vert soutenu, est devenu l’un des treks les plus courus chez les randonneurs européens.

    A midi, après trois heures de marche le long d’un sentier constitué de panneaux explicatifs sur l’histoire du kif, Dietrich et Ulrike rejoignent la voiture pour un déjeuner à Bab Berred. Dans la ville aujourd’hui rénovée, ils achètent quelques sticks au cannashop du coin, Luckif Strike bio pour monsieur, Ztla light pour madame.

    D’un commun accord, ils décident de ne pas en fumer plus d’une après le repas. Ce soir, ils doivent rester lucides. Le couple d’hédonistes s’est inscrit à un atelier cuisine à Ketama, pour apprendre à préparer le maâjoun (une confiserie à base de cannabis)...

    Ils pourront rapporter deux ou trois pots pour leur consommation personnelle à Berlin. Comme presque toute l’Europe, l’Allemagne avait entériné la légalisation du cannabis avant la fin des années 2010... 

    suite site source :http://www.slateafrique.com/99963/maroc-pourquoi-il-faut-legaliser-le-cannabis


    votre commentaire